Le petit pavillon que j'ai acheté il y a deux ans à une famille de la ville de Haskovo, regarde vers le sud. Vers les montagnes sauvages des Rhodopes qui cachent la Grèce du Nord et ses vents doux de la Mer d'Egée. La Mer Blanche, comme on l'appelle ici.
Le regard est libre, car il n'y a que des champs fertiles qui me séparent du fleuve qui s'appelle la Maritza à une 300 mètres. Il y a deux millenia et demi, le fleuve s'appelait l'Ebros, sous le régime des tribus thraces, puis grecs. C'est l'Evros qui a donné son nom à l'Europe. C'est jusqu'ici que le dieu Zeus, transformé en taureau, chassait la vache Europa.
On dit que les Argonautes ont monté le fleuve pour rencontrer les Amazones qui s'étaient séparées de leur sein droite afin de mieux miser leurs flèches meurtrières sur les intrus.
Il n'y a plus de circulation navale sur le fleuve. Les commerçants de la Grèce et de la côte adriatique qui venaient s'amarrer à Plovdiv encore au XIXme siècle, ont disparu. La communauté des négociants de Dubrovnik à Plovdiv s'est évaporée depuis longtemps.
Un homme vient se présenter au mur autour de mon pré. Il est d'ici, de Dobri Dol. Il parle bulgare, bien sûr. Il veut m'aider à gérer mon jardin. Mais je ne parle pas trop le bulgare. Mais la langue turque, ça irait? Oui, ça irait, car j'ai connu des femmes turques formidables à Eindhoven, en Hollande.
C'est comment on se débrouille ici. Avec des amis bulgares, turcs et tsiganes.
Dobri Dol montre que le multiculti marche. C'est pourquoi je m'y sens chez moi.